Bonjour à toi,

Je fais une petite entorse cette semaine à notre format habituel, actualité oblige. Ce sera une version plus flash, parce que ça bouge vite… et aussi l’occasion pour moi de te dire merci.

Paiement.fr a un mois (et six jours). On vient de passer la barre des 1 200 inscrits, et je reste portée par la même mission : rendre les sujets paiement accessibles, parfois avec humour, souvent avec les codes des internets, mais toujours avec l’envie de décoder ce qui compte vraiment pour vous.

Cette semaine, on parle de Wero, encore - mais sous un autre angle : celui des banques en ligne, qui avancent à leur rythme.

Après Revolut cet été, Fortuneo rejoint le mouvement et intègre la solution de paiement instantané européenne. Résultat : 1,4 million de clients peuvent désormais y accéder directement.

Un petit pas pour le W(H)ero, un grand pas pour la souveraineté européenne des paiements ? Ce n’est pas encore la ligne d’arrivée, mais une étape supplémentaire qui compte.

Juste après le dossier Wero, tu retrouveras aussi les détails sur le partenariat Edenred–Visa, l’investissement de Mastercard en France et la nouvelle présidence du GIE CB.

Belle semaine !

Chloé

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Fortuneo intègre Wero : le tempo s'accélère, sans précipitation

Un an après son lancement officiel, Wero poursuit son implantation dans les canaux bancaires. Après les réseaux traditionnels, c’est les banques en ligne qui s’ouvre petit à petit : Fortuneo, filiale du Crédit Mutuel Arkéa, propose à son tour la solution de paiement instantané européenne à l’ensemble de ses clients. Une évolution plus progressive que spectaculaire, mais qui traduit la montée en puissance régulière d’EPI.

Une étape logique, mais structurante

Jusqu’ici, Wero s’appuyait sur une base solide de plus de 43 millions d’utilisateurs en France, Belgique et Allemagne, principalement issue du remplacement de Paylib, Payconiq et iDeal. Son intégration chez Fortuneo marque une phase intéressante : celle de l’entrée dans les usages bancaires du quotidien, au-delà des établissements de réseau.

Après Revolut, qui l’a intégré dès juin dernier pour ses clients européens, Fortuneo prolonge la mouvance. Les clients peuvent désormais à compter de ce mercredi 22 octobre, envoyer ou recevoir de l’argent en moins de dix secondes, gratuitement, à partir d’un simple numéro de téléphone ou e-mail et ce, jusqu’à 300 euros : une expérience pensée pour être aussi simple qu’un transfert entre amis.

« Nous rendons Wero accessible à l’ensemble de nos clients dès aujourd’hui. Cette nouvelle fonctionnalité se veut simple, rapide, gratuite et fluide pour réaliser des paiements entre particuliers en quelques secondes », souligne Grégory Guermonprez, directeur de Fortuneo.

Une continuité stratégique pour Arkéa

Pour le Crédit Mutuel Arkéa, l’intégration de Wero par Fortuneo s’inscrit dans une trajectoire de long terme, déjà posée dans son plan stratégique Faire 2030. Ce plan, dévoilé en janvier dernier, repose sur trois axes : renforcer la souveraineté du groupe, ouvrir son modèle d’affaires et accélérer la transformation digitale.

Dans cette logique, la banque en ligne n’est pas un segment à part : c’est un laboratoire d’innovation. Le Crédit Mutuel Arkéa y teste les usages, les technologies et les interfaces qui préfigurent la banque de demain.

Et Wero s’intègre parfaitement dans cette approche : une solution européenne, instantanée, interbancaire qui répond autant à des objectifs d’expérience client qu’à une ambition d’autonomie technologique.

““Faire 2030” place la banque en ligne parmi les leviers majeurs de croissance du groupe, au même titre que le capital-investissement ou les services B2B.” indiquait alors la direction au moment de la présentation du plan.

L’adoption de Wero illustre cette double ouverture maîtrisée :

  • Ouverture technologique, en s’adossant à une infrastructure de paiement paneuropéenne qui réduit la dépendance aux schemes internationaux.

  • Ouverture stratégique, en contribuant à un cadre commun pour le paiement de compte à compte à l’échelle du continent, sans renoncer à la logique coopérative du groupe.

C’est une approche pragmatique, fidèle à la culture Arkéa : innover sans renier le modèle, avancer sans rupture, mais en posant des jalons concrets vers une finance plus souveraine et plus intégrée. Dans un paysage où la souveraineté reste souvent un mot-valise, Arkéa la traduit ici par des choix opérationnels - dont Fortuneo et Wero sont les premiers maillons visibles.

Une question de tempo, plus que de fracture

L’intégration de Wero chez Fortuneo n’a rien d’un geste isolé.

Elle s’inscrit dans un mouvement désormais bien enclenché dans le secteur des banques en ligne, mais à des vitesses variables selon les modèles et les priorités économiques:

  • Chez Nickel, les premiers tests sont prévus fin 2025, pour un déploiement global à l’ensemble des clients début 2026;

  • Du côté de N26, l’intégration est également « en cours », sans date officielle mais « dans les semaines qui viennent », selon un porte-parole de la société;

  • Et chez BoursoBank, le sujet semble désormais bien sur la table de manière officielle : « Aujourd’hui, BoursoBank réfléchit à proposer cette solution de paiement », indique la banque.

Si on fait les maths rapidement : c’est 14,1 millions de nouveaux clients qui pourront utiliser Wero dès 2026 sur le marché français.

Les paiements C2C, gratuits pour le payeur comme pour le bénéficiaire, ne génèrent aucune rémunération pour la banque. Le véritable enjeu concerne donc le C2B : conçu pour cannibaliser les paiements par carte, il pourrait réduire significativement cette rémunération si son modèle ne s’aligne pas sur l’interchange, ce qui reste peu probable au vu des fortes attentes en matière de baisse des coûts de la part des marchands, qui doivent être suffisamment motivés pour accepter Wero” explique Gabriel Lucas, directeur chez Redbridge DTA. “Dans ce contexte, attendre permet à BoursoBank de préserver ses marges, de garder la main sur la relation client et de renforcer sa position de négociation vis-à-vis de Wero. Par ailleurs, cette approche s’inscrit dans la continuité de la stratégie adoptée par la plupart des néobanques, y compris celles appartenant à de grands groupes français, qui choisissent déjà de ne pas proposer CB comme réseau de paiement carte », poursuit-il.

En pratique, les rythmes d’intégration varient selon les modèles économiques et la maturité technologique de chaque acteur. Wero avance par étapes, entre expérimentation, alignement interne et arbitrage sur le modèle de revenus: une dynamique progressive, mais désormais bien engagée.

Le commerce comme prochain test

Pour l’heure, Wero ne couvre encore que les paiements de personne à personne (P2P). La prochaine étape, attendue pour 2026, concernera le commerce en ligne, avant un éventuel déploiement en point de vente. C’est sur ce terrain que se jouera sa crédibilité vis-à-vis des marchands, et donc sa capacité à concurrencer les réseaux de cartes. Le modèle économique reste en construction : frais commerçants, partage de revenus, gouvernance, incitations bancaires et les usages demeurent en discussion. L’interopérabilité en cours avec plusieurs solutions nationales - Bizum, Bancomat, SIBS, Blik - en partenariat avec l’European Payments Alliance, constitue un levier décisif.

Avec Fortuneo, Wero franchit une étape symbolique mais attendue : celle de la normalisation progressive de l’instant payment dans les usages européens. Loin des annonces spectaculaires, cette intégration illustre la réalité du projet Wero : une souveraineté qui s’écrit lentement, au rythme des arbitrages économiques et des capacités techniques.

Ce que montre l’exemple Fortuneo est un pas de plus dans l’ancrage d’un écosystème bancaire européen capable de s’aligner sur des standards communs, sans renier la diversité de ses acteurs.

Les deals et mouvements de ses derniers jours

Edenred s’allie à Visa pour certifier sa plateforme de paiement

Belle séquence pour Edenred, qui a publié ce mardi des résultats supérieurs aux attentes et un partenariat stratégique avec Visa. L’accord prévoit la certification par Visa Europe de l’infrastructure interne d’Edenred, couvrant l’émission et le processing des transactions sur l’ensemble de ses activités : avantages salariés, mobilité, gestion de flottes et paiements B2B. Concrètement, cette alliance permet au groupe français d’émettre directement des moyens de paiement Visa, sans dépendre d’un tiers émetteur, tout en renforçant la compatibilité internationale de ses solutions. Edenred y voit une étape de plus dans la consolidation de sa plateforme technologique, tandis que Visa tire parti de son ancrage commercial auprès de 60 millions d’utilisateurs dans 45 pays. En Bourse, le titre a bondi de plus de 10 % après l’annonce d’un chiffre d’affaires du troisième trimestre en hausse de 8 % à données comparables, porté par les segments Mobilité (+14 %) et Avantages & Engagement (+9 %).

Mastercard investit 250 M€ dans trois data centers en France

Nouvelle étape dans la localisation des infrastructures de paiement : Mastercard va investir près de 250 millions d’euros dans la création de trois data centers en France. L’objectif : rapprocher son infrastructure des acteurs bancaires et commerçants européens, renforcer la résilience de son réseau et garantir la continuité opérationnelle face aux risques naturels ou géopolitiques. Présente depuis plus de 60 ans sur le continent, la société veut faire de la France l’un de ses principaux hubs européens, aux côtés de Dublin et Amsterdam. Cet investissement s’inscrit dans un contexte où la question de la localisation des données est devenue stratégique. Une manière de répondre à la demande croissante des institutions et des régulateurs européens pour une plus grande maîtrise des infrastructures critiques de paiement.

Note : je réfléchis à faire un dossier spécial sur le cloud et les acteurs du paiement - si ça t’intéresse de me donner ton point de vue, ma boite mail est ouverte.

Fumée blanche au GIE Cartes Bancaires : Gérald Grégoire élu Président

Comme l’avaient révélé Les Échos, le GIE Cartes Bancaires a élu ce lundi Gérald Grégoire à la présidence de son Conseil de Direction, en remplacement de Jean-Paul Mazoyer. Cette nomination s’inscrit dans la continuité du plan stratégique CB Dynamique 2026, centré sur deux priorités : souveraineté et innovation. Aux côtés de Philippe Laulanie, administrateur et directeur général de CB, Gérald Grégoire entend poursuivre le développement d’un écosystème national de paiement fort et interbancaire, à travers la signature « CB, le paiement made in France ». L’objectif : consolider la place de CB comme première ligne de défense du paiement en France, tout en accompagnant les évolutions technologiques et réglementaires européennes. Actuel Directeur général adjoint de Crédit Agricole S.A., en charge du pôle Client, Développement et Innovation, Gérald Grégoire apporte une solide expérience du développement commercial et de la transformation digitale au sein du groupe Crédit Agricole, qu’il a rejoint en 2002.